Respectons les limites d’autrui
Nous entendons bien souvent parler de l’importance du respect de soi et de la reconnaissance de nos propres limites. Or, nous entendons peu parler de l’importance de respecter autrui et ses limites. Je vous propose donc d’investiguer quelque peu cet axe dans ce court billet.
1) Nous sommes des êtres singuliers
Respecter les limites d’autrui revient à reconnaître implicitement que nous sommes tous des êtres singuliers, c’est-à-dire uniques. En effet, nous avons tous des histoires, des aspirations, des valeurs, des besoins, des souhaits différents. Quand bien même certains d’entre eux seraient similaires, cette similarité correspond à une lecture et une compréhension partielles. Par exemple, aller dans une direction commune ne signifie pas nécessairement emprunter un même chemin et encore moins vivre des expériences identiques. La quête du bonheur illustre ce point. En effet, les ingrédients du bonheur diffèrent d’un individu à l’autre. Tandis que pour certains la voie du bonheur inclut une vie familiale riche et épanouie, pour d’autres elle implique un certain éloignement familial. L’acceptation des limites d’autrui, et donc de l’altérité, nécessite la prise de conscience que nous ne sommes pas tout-puissants, que chacun mérite le respect, et que nous n’avons aucunement le droit d’abuser d’autrui.
2) Nous sommes des êtres libres
En respectant les limites d’autrui, nous reconnaissons que chacun est libre de s’autodéterminer. L’autodétermination implique le renoncement au fantasme d’auto-engendrement. En effet, prendre conscience qu’il nous appartient de nous autodéterminer revient à prendre conscience de notre individualité ; sans pour autant rejeter nos Origines – « Je ne suis pas mon père, je ne suis pas ma mère, je ne suis pas mon conjoint ou ma conjointe, je ne suis pas mon voisin, mon collègue de travail ; je suis moi. ». En somme, nous nous inscrivons dans une lignée familiale qui fait partie d’un monde en mutation empli d’êtres divers, qui eux-mêmes participent de l’Histoire. Il y a un avant, un pendant et un après.
Soyons toutefois conscients que l’ « autodétermination aliénante » est l’un des dangers de l’autodétermination ! J’entends par cette expression une autodétermination en porte-à-faux et/ou rigide, c’est-à-dire figée face à quelqu’un ou quelque chose – « Mes parents ont agi de telle façon, donc je vais faire tout le contraire d’eux » – et/ou qui supposerait que l’image ou l’idée que l’on se fait de nous est définitive et donc, que le principe de mutabilité ou de changement ne s’applique pas – « Je suis comme cela, et c’est tout. Je ne changerai jamais. ». Tout est changement.
3) Nous sommes des êtres créateurs
Être libre ne signifie pas vivre sans contrainte ni limite. Bien au contraire. La liberté nous permet de poser des choix conscients dans un cadre donné. La liberté implique de renoncer à l’état de nature pour devenir un être de culture. En somme, l’être libre est sorti du primat des pulsions et comprend que la liberté induit aussi bien des droits que des devoirs. Notre liberté s’arrête là où débute celle d’autrui et vice versa. La liberté favorise donc la sortie de l’illusion de toute-puissance ainsi que l’ouverture à un monde intérieur et extérieur complexe à travers le principe de renoncement. En ce sens, la liberté est-elle respectueuse d’autrui car elle témoigne de la transformation de la pulsion d’emprise (« Je souhaite contrôler autrui à n’importe quel prix. », « Je veux cet objet, tant d’argent, là, maintenant, quitte à mettre en place tout un tas de stratagèmes afin de les obtenir. ») en des pulsions secondarisées, reconnaissant à autrui le droit de choisir pour lui quand bien même sa décision ne nous satisferait pas. Ce faisant, nous nous offrons l’opportunité d’accéder à de nouvelles possibilités, car en acceptant de renoncer à une personne, une idée, un travail, une représentation, nous nous ouvrons au champ des possibles. Ainsi, la liberté est-elle en lien avec la création. En respectant les limites d’autrui, nous nous ouvrons donc à toujours plus de créativité.
4) Nous sommes des êtres authentiques
Nous sommes tous des êtres authentiques (ou en qui réside cette authenticité). En revanche, nous n’en avons pas tous conscience. Être un être authentique signifie incarner qui nous sommes profondément, dans toute notre pureté et notre autorité. En effet, l’être authentique, autrement dit l’être qui incarne celui qu’il est, manifeste une autorité naturelle puisqu’émanant du plus profond de son âme. Aucune vicissitude, aucune aspérité n’apparaît, si ce n’est la fluidité de celui.celle qui a surmonté les obstacles.
En respectant les limites d’autrui, nous nous offrons la possibilité de sortir d’une certaine frustration et d’entamer un chemin de connaissance et d’authenticité. Car, là où la frustration gît, la connaissance prend le pas, et l’amour éclate. Cet amour qui nous fait reconnaître que nous sommes qui nous sommes, et que nous nous inscrivons tous dans une filiation transcendantale.
Ce que nous nous offrons, nous l’offrons à autrui. En nous ouvrant à la connaissance, à l’authenticité et à l’amour, nous offrons à autrui la possibilité qu’il s’ouvre à ses potentiels de connaissance, d’authenticité et d’amour !
EN RESPECTANT LES LIMITES D’AUTRUI, NOUS NOUS OUVRONS À NOTRE PROPRE NATURE.
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